samedi 3 avril 2010

Nouveau fiasco du brouilleur de portables,

Le brouilleur de portables, un appareil à portée très limitée
LEMONDE



Il s'appelle Jean-François, mais refuse de donner son nom de famille. Ce quinquagénaire sportif, toujours en costume-cravate, se présente comme un ancien des renseignements généraux. Désormais, il travaille pour Magnum Telecom, une société spécialisée dans la vente en ligne de brouilleurs de portables.

Ces appareils rencontrent un succès retentissant depuis la parution, il y a quelques semaines, de plusieurs articles de presse. "On est passés de 50 commandes par mois à 300 en quelques jours", explique-t-on chez Magnum Telecom. "Les gens en ont marre des sans-gêne", avance Jean-François en citant "les médecins, les avocats ou les enseignants" confrontés à des clients ou à des élèves bavards. Le brouilleur ferait aussi recette auprès des "services officiels", car, rappelle-t-il, "les bombes se déclenchent par téléphone portable".

Le modèle le plus simple, vendu 150 euros, se présente sous la forme d'un petit boîtier en plastique noir rechargeable et doté d'un interrupteur. "Une fois activé, il diffuse des ondes qui annulent celles qu'émet un téléphone portable", explique Pierre-Yves Daumas, fondateur de Magnum Telecom.

Nouveau fiasco

Pour démontrer l'efficacité du brouilleur, Jean-François a fixé rendez-vous sur un quai du métro parisien. Il marche de long en large, la main dans la poche de sa veste, prêt à déclencher le mécanisme si un quidam devait se présenter en pleine conversation téléphonique. Mais, sur le quai, les bavards impénitents s'avèrent moins nombreux qu'il ne l'imaginait. Certains se contentent d'un discret coup de fil avant de raccrocher promptement. Nouvelle tentative à Montparnasse, dans les dédales de la gare. Une jeune femme semble raconter des pans entiers de sa vie à son interlocuteur. Le boîtier est actionné, mais ne trouble pas l'inconnue. "Il faut attendre une petite minute, le temps que les ondes atteignent l'objectif", se rassure Jean-François en cherchant à rattraper la demoiselle.

Une terrasse de café, maintenant. Le brouilleur est posé sur la table. A 3mètres, une voyageuse détaille son séjour parisien au téléphone. Nouveau fiasco. Jean-François incrimine cette fois "le puissant relais de la tour Montparnasse".

Chez Magnum Telecom, M. Daumas admet que les brouilleurs ne sont pas toujours efficaces. Un petit appareil "brouille mieux les portables récents que les anciens, qui diffusent un signal plus fort", concède-t-il, tout en assurant que "seuls 5 % des acheteurs font part de difficultés". Les modèles plus performants, fixés dans les restaurants ou les salles de réunion "brouillent jusqu'à 40 mètres à la ronde", assure Nicolas Allard, fondateur de Shopinnov.com.

Si la vente de ces objets est totalement libre en France, leur utilisation reste interdite par la loi. Seules les salles de spectacle et les établissements pénitentiaires peuvent en installer. En pratique, les exploitants des salles ne semblent pas en faire un usage immodéré. "Nous préférons rappeler avec un peu d'humour aux spectateurs de rallumer leur portable à la fin du spectacle", témoigne Benoît Betchen, directeur d'un centre culturel de 500 places à Caudry (Nord).
Olivier Razemon

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